Européennes 2019 : la stratégie Macron
2017 fut une année riche en politique, 2018 s’annonce comme une année en creux. Pourtant, le président Macron a déjà réfléchi à plusieurs mesures en vue des élections européennes. Ces dernières, largement passées inaperçues, vont vraisemblablement favoriser La République en Marche. Le 3 janvier 2018, le ministre d'Etat, ministre de l’Intérieur Gérard Collomb a présenté à l’Assemblée nationale le projet de loi numéro 539 relatif à l’élection des représentants au Parlement européen qui viendrait amender la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977. Ce texte a été voté en première lecture à l'Assemblée ce mardi 20 février. Common Wave décrypte pour vous ce que signifient ces règles pour les élections européennes, prévues pour fin mai 2019.
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Drapeaux de la France et de l'Union Européenne. |
Mode de Scrutin : la fin des circonscriptions ?
La première mesure de ce projet
de loi souhaite mettre fin aux 8 circonscriptions qui divisaient la nation pour
revenir à une liste nationale. Cette mesure a été ajoutée au projet de loi
après une concertation avec l’ensemble des partis politiques français. Seuls
Les Républicains se sont montrés en défaveur de cette proposition, dénonçant un
« tripatouillage institutionnel » servant à favoriser La République
en Marche. En effet, le retour à une unique circonscription nationale en lieu
et place des 8 circonscriptions qui existaient depuis 2004 permettrait au parti
d’Emmanuel Macron de compenser son manque d’implantation locale. LREM et son
allié le MODEM espèrent ainsi éviter de reproduire le schéma perdant des
sénatoriales. Pour la ministre auprès du ministre d'Etat, ministre de l’Intérieur, Jacqueline
Gourault, cette mesure cherche à redonner de l’intérêt aux élections.
Le
premier vote à l’Assemblée, le 14 février, a montré que les Insoumis et les
Communistes ainsi que la Nouvelle Gauche apportaient leur soutien à la
« seule » mesure de « bon sens » du texte, selon les mots de
Loïc Prud'homme, porte parole de la FI. Les LR proposaient eux 13 circonscriptions pour autant de
régions, tandis que la Nouvelle Gauche souhaitait des circonscriptions
spécifiques pour l’Outre-mer.
Campagne électorale : une réévaluation du temps de parole.
Ça n’est pas la seule mesure de
la loi qui peut être interprétée comme une tentative de favoriser La République
en Marche. En effet, concernant le temps de parole accordé à chaque parti
politique, la nouvelle loi propose une réforme qui offrirait une répartition du
temps d’une part en fonction de l’existence d’un groupe parlementaire, d’autre
part au prorata du nombre de représentants au Sénat et à l’Assemblée Nationale.
Dans les détails, le projet de loi définit trois temps de paroles distincts et
cumulables : le premier est un temps
forfaitaire pour tout parti ou groupe politique en faisant la demande, et
disposant d’au moins 75 candidats. Le second correspond à deux heures d’antenne
au premier tour réparties entre les groupes parlementaires au prorata de leur
nombre de députés. Enfin une heure sera répartie entre tous les partis ou
groupes politiques candidats.
La France Insoumise par la voix de Jean Luc
Mélenchon a dénoncé une tentative de « museler l’opposition ». De fait le « raz
de marée » de la République en Marche à l’Assemblée Nationale, 310 députés à
elle seule, et 357 en comptant les députés Modem et apparentés, sur les 577
membres de l’hémicycle, assurerait un temps de parole important. A l’inverse par
ce biais le temps de parole de La Nouvelle Gauche et de la France Insoumise,
respectivement 32 et 27 députés, se retrouverait réduit. Il en va de même pour
le Front National, ce dernier n’ayant pas réussi à construire un groupe
parlementaire à l’Assemblée Nationale.
Listes transnationales : une réforme avortée.
Le dernier article de cette loi
portait une mention des listes transnationales. La proposition visait à trouver
une solution pour répartir les eurodéputés britanniques, amenés à quitter le
parlement en raison du Brexit. Emmanuel Macron proposait que 27 des 73 sièges
des députés du Royaume-Uni soient occupés par des membres issus de listes
transnationales. Comme leur nom l’indique, ces listes devaient être composées
de membres issus de différents pays de l’UE. L’accueil de cette proposition en
France avait été assez mitigé dans la classe politique. Les Républicains, Le
Front National et la France Insoumise notamment avaient émis un avis
défavorable.
Cette idée lancée par le
président de la République était ambitieuse, et une commission parlementaire
s’était prononcée en faveur de cette incitative mais le parlement européen s’y
est finalement opposé en séance plénière le 7 février. C’est notamment le PPE,
Parti Populaire Européen, l’union des droites européennes, qui s’y est très
majoritairement opposé. En revanche le parlement européen a émis un avis
favorable à la réduction du nombre de députés de 751 à 701, ainsi que la
répartition des sièges restant entre les nations selon des calculs
démographique. Dans le cas de la France, cela se traduit par un gain de 5
places, portant le nombre d’eurodéputés français à 79. La validation de cette
décision est maintenant du ressort du conseil de l’Europe.
Sur le plan des listes
transnationales, un communiqué de l’Élysée précise que « La France continuera à
défendre cette idée dans les mois à venir, car elle contribuerait à renforcer
la démocratie européenne en créant un débat sur les enjeux européens, et non
strictement nationaux, lors des élections européennes. » Toutefois cet échec
est un revers pour Macron dans sa volonté de se poser en leader européen, quand
bien même il entend poursuivre une de ses promesses de campagne d'établir des
consultations européennes. Comme l’écrit En Marche « Il s'agit de fédérer les
peuples d'Europe, que ce soient les peuples qui adhèrent au projet européen,
pas les politiques qui changent en permanence » mais cette proposition demeure
pour l’instant au stade d’ambition.
Ainsi le projet de loi concernant
les élections européennes répond à deux objectifs très intrinsèquement
liés : À court terme la victoire de LREM aux élections européennes et à
plus long terme la confirmation de la stature européenne du président Français
et le réenchantement de l’idéal européen tel que présenté lors de son discours
de La Sorbonne. Mais les élections européennes ne sont pas le seul horizon
d’Emmanuel Macron qui, selon les informations d’Europe 1, met déjà en place une
stratégie de conquête des grandes villes françaises.
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