Cruyff, la recherche éternelle de la liberté
Allez, bon vent Cruyff ! ''Bon vent'', comme cette expression te sied bien. Toi qui dans les années 70s souffla sur le monde du football ces bourrasques révolutionnaires propres à ta décennie. Toi qui semblait voler sur le terrain, libre de tout poste, de tout marquage, de toute contraire. Le football total venait de naître, et balayerait l'Europe et changerait la face d'un ballon rond.
Le chef d'orchestre de cette partition
résolument rock, c'était toi et toi seul. Ni la place centrale de
Rinus Michel dans ce procédé, ni la défaite de 1974, ni les trois
C1 consécutives du Bayern ne pourront rien y changer : tu fus
seul le roi des 70s, gagnant par tes foulées sauvages ta place au
panthéon à côté des autres seigneurs de ce sport. Mais même là,
tu étais trop à l'étroit, alors tu t'es enfui aujourd'hui.
Comme tant d'autres de ma génération,
je t'ai découvert à travers les livres, les images usées, les
pages Wikipédia et la voix feutré d'émotions des anciens. Le
football a cela de si beau qu'il est avant tout une fresque
historique que l'on prend autant de plaisir à fouler que les
terrains présents. On apprends Pelé, on adule Maradona, on respecte
Beckenbauer et on s'émeut pour Cruyff. Pour la clope, le petit
merdeux devant le Franquisme, les victoires fastes, les défaites
injustes, 92, 74 et surtout pour la liberté, partout, toujours, tout
le temps.
Il est étrange de voir comment on peut
s'émouvoir de la mort d'une personne que nous n'avons jamais vu
réellement. Mais c'est peut-être cela ta beauté, tu as toujours su
transcender le footballeur pour nous montrer l'homme, le
révolutionnaire, le rêveur. Au fond, ce n'est pas le joueur de
football que l'on pleure aujourd'hui, mais bien l'idée qu'il en
avait.
Enfants, lorsque nous jouions au
ballon, on se prenait pour des Zidane, des Henry, des Ronaldo ou
Shevchenko. En réalité, nous étions tous un peu des petits Cruyff
en puissance sans le savoir. Sans poste fixe, même les gardiens
volent, sans conformisme, sans autre désir que celui de dévorer les
espaces semblant infinis de la cour de récréation, cheveux au vent
et sourire aux lèvre. Et puis nous avons grandit. Aujourd'hui, nous
avons même appris à ta mort, Johan. Alors on se rend compte que
nous passons nos vies à courir après la balle à la recherche des
chevauchées hollandaises de notre enfance.
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